Table de cuisine bois et acier

« Josiane ! … Josiane ! …’porte-moi les patates s’il te plait ! »
Anatole était angoissé. Depuis deux heures maintenant, il s’affairait dans la cuisine pour que tout soit parfait. Le plan de travail était couvert de nourriture. Légumes de toutes sortes, viandes en attente de passer au feu, et différents plats en cours de préparation. Le moindre espace accueillait une casserole, un plat, ou des épluchures.
Anatole avait vu grand pour la venue du Préfet.
Ce n’est pas tous les jours que le Monsieur le Préfet vient vous rendre visite. Chez vous. Pour dîner.
Si c’est un honneur pour Anatole, fils et petit-fils d’artisans, modeste semellier, de recevoir cette visite, c’est aussi une source de stress énorme.
Il avait cassé sa tirelire pour mettre les petits plats dans les grands et dévalisé l’épicerie. Il avait décidé de montrer son savoir-faire culinaire.
Josiane accourait depuis la cave avec un filet à la main.
« Voilà … » dit-elle encore haletante.
« J’les mets ou ? » demanda-t-elle.
« Ben …  » Anatole fut bien gêné de ne pouvoir y répondre. Tout son espace de travail était pris. Certains casseroles étaient empilées en équilibre au milieu des autres préparations. Anatole avait tout prévu. Sauf ça. Il n’avait pas l’habitude de faire autant de cuisine, et surtout en si grande quantité.
La table du salon était déjà apprêtée de vaisselle (celle de grand-mère qu’on ne sort qu’en de grandes occasions). Ils ne pouvaient la déplacer.

« J’vais m’chercher la tab’ d’l’atelier ! » décida Anatole.
Surprise, Josiane l’accompagna dans son atelier de fabrication de semelles.
Ils y ramenèrent une table simple, robuste, mais terriblement abîmée par les nombreuses heures de pratique professionnelle. Trouée de ci, usée de là, elle sembla pourtant (et contre toute attente) trouver sa place dans ce coin cuisine. Anatole, plus serein, put finir de préparer son festin.

C’est ainsi qu’est née la première table de cuisine.