Meuble télé
Le général Krotpoff, haut fonctionnaire russe, fut désigné en 1942, responsable de la sécurité électro-visuelle dédiée à la surveillance des camarades, eux-mêmes, en charge de contrôler le bon déroulement des opérations de fabrication de poutine, le plat préféré du chef du Kremlin à ce moment-là. Il faut savoir que la recette initiale était jalousement gardée dans un coffre blindé et enterré sous terre à plus de cinquante mètres. Autant vous dire que rien, absolument rien du secret de fabrication ne devait s’échapper de cette usine de poutine, un secret national, une fierté kremlinesque.
Le général prenait très à cœur son nouveau travail. Il passait des heures et des heures à scruter des écrans, à l’affut du moindre éternuement suspect, du moindre relâchement d’attention, du moindre col de chemise mal repassé.
Pour cela, il s’était organisé méthodiquement. Notant à chaque fois l’heure, le bureau, et le matricule du camarade incriminé. Il ne ratait rien. Il était même capable de faire des statistiques, de prévoir les heures de départ et d’arrivée de chacun, et de tout commenter dans des cahiers sans ligne. Bien évidemment, il fut vite débordé de cahiers noircis de notes. Au départ, il les plaça sur le coin gauche de son bureau. Puis, lorsque la pile atteignit une belle hauteur (et par crainte de tout faire tomber), il en positionna également sur le coin droit. Puis au milieu. Puis partout.
C’est à ce moment que son irritation commença à poindre. Il n’avait plus de place sur son bureau. Un bureau, c’est fait pour bureauter. D’ailleurs, ce fût particulièrement gênant lorsque, Ivana, la charmante camarade secrétaire, lui présenta des papiers à signer. Il ne put le faire car il n’avait plus de place pour s’appuyer, tant le bureau croulait sous les cahiers.
Il n’avait plus le bureau digne d’un camarade général. Il fallait que cela cesse.
Heureusement, le général Krotpoff était un homme plein de ressources. Il ordonna la construction d’un meuble qui irait sous ses écrans de contrôle, et qui pourrait contenir ses cahiers.
C’est ainsi qu’est né le meuble télé.
la vérité
Pour des raisons esthétiques, le client voulait un meuble de télévision qui fasse la largeur de son téléviseur. Il voulait une dominante de bois qu’il trouve plus agréable à regarder que l’acier. Et en même temps, le meuble devait dégager une impression de vieille caisse renforcée de métal. Le genre de caisse qui aurait beaucoup voyagée. Dans les critères techniques, le meuble devait être sur pieds pour y glisser une barre de son dessous, et contenir les éléments traditionnels de vidéo (lecteur DVD et quelques boîtes de DVD), avec le boitier Internet. Le tout facilement accessible et modulable.
Je lui ai donc proposé un croquis. Seuls les côtés du meuble seront agrémentés de fers de « renforts » avec des rivets. Les faces avant basculant vers l’avant n’auront qu’un cadre métallique pour mettre le bois en évidence. Nous nous sommes mis d’accord sur un style de pieds de meuble.
Je suis passé à la modélisation pour juger des dimensions et du design général. C’est à ce moment que les contraintes de réalisation apparaissent.
La fabrication peut commencer. Tout est fait dans notre atelier. A chaque étape, des photos de l’avancement sont envoyées au client afin qu’il puisse voir l’évolution du meuble. Ce qui nous a permis de nous rendre compte que le choix initial de couleur de bois n’était pas le bon.
Trop jaune. Il a fallu tout poncer et appliquer un brûlage sur le bois. Cette technique permet de faire ressortir les veines du bois, et lui donne un aspect vieilli.
Le produit final est placé à son emplacement prévu. (Pour des raisons de confidentialité, il ne s’agit pas du salon du client.
Données techniques
Dimensions en Cm (L x l x h) : 120 x 40 x 50
Plateau flacheux en épicéa épaisseur de 23 mm
Structure en épicéa 18 mm d’épaisseur
Cornières et plats acier de 30 mm épaisseur de 3 mm
Rivets acier de diamètre 6 mm